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Prud’hommes : Vers une hausse des litiges pour harcèlement ou discrimination ?

Le 08 septembre 2017
Les indemnités pour harcèlement ou discrimination demeurent hors-barème. Une aubaine pour les salariés qui estiment les barèmes trop bas, mais la stratégie peut-elle payer ?

Indemnités prud’homales plafonnées… sauf en cas de harcèlement ou de discrimination.   Promesse tenue pour Emmanuel Macron. Les indemnités de licenciement seront dès la publication des Ordonnances portant réforme du code du travail soumis à un barème obligatoire, sauf en cas d’atteinte portant sur les droits fondamentaux du salarié, c’est-à-dire sauf en cas de harcèlement et/ou de discrimination.   L’objectif, largement plébiscité par les entreprises, est de donner plus de visibilité, certains patrons n’hésitant plus à parler de « roulette russe » lorsqu’ils évoquaient le risque lié à l’embauche d’un salarié.   Les syndicats soulèvent pourtant dès à présent la faiblesse de ces barèmes, rappelant que le montant des indemnités est plafonné à 20 mois de salaire à partir de 30 ans d’ancienneté quand ce montant pouvait être atteint dès 10 ans d’ancienneté dans le précédent barème de la Loi Macron, retoqué par le Conseil Constitutionnel en 2015.   Multiplier les demandes en harcèlement ou discrimination, une stratégie pour faire « grimper l’addition » ?   Par conséquent, la tentation est grande pour les avocats en droit social, de chercher à mettre en place des stratégies permettant de faire « grimper l’addition » pour leurs clients salariés.   A priori deux solutions : soit multiplier le nombre des chefs de demande, mais comme le rappelait récemment Me Avi Bitton, avocat en droit du travail spécialisé dans la défense des salariés, cela ne permettra pas de gagner plus de quelques centaines d’euros de plus, soit multiplier les demandes en harcèlement ou discrimination, permettant ainsi aux juges de s’affranchir des barèmes.   Sauf qu’à ce jour, les demandes en harcèlement et/ou discrimination sont difficiles à prouver au tribunal. Car c’est à celui qui invoque un fait de le prouver, et contrairement à ce que beaucoup pensent, enregistrer l’auteur des faits à son insu n’a pas, à quelques exceptions près, un mode de preuve admissible dans les tribunaux français. Or, il est souvent très difficile d’obtenir des attestions de témoins, qu’ils soient clients ou collègues… et les magistrats sont toujours méfiants lorsqu’un salarié attend d’être licencié pour invoquer des violences aussi graves…   A condition d’être encouragée par les juges des prud’hommes…   Oui, mais… Ca, c’était avant la réforme Péricaud du Code du Travail.   En effet, l’Union Syndicale des Magistrats (USM), qui représente tout de même 70% des juges en France, observait dès le 25 juillet dernier que « instaurer des plafonds et des planchers intangibles porte gravement atteinte à la fonction même de juger » car « La décision de justice (…) se prononce sur les moyens de réparer l’intégralité des préjudices subis en cas de manquement démontré. Des barèmes contraignants contreviennent à ces missions ».   Par conséquent, les juges pourraient bien être également tentés de contourner le barème afin de retrouver leur liberté d’appréciation… et par conséquent d’admettre de plus en plus facilement les cas de harcèlement ou de discrimination.   Cela serait d’autant plus facile que la notion même de harcèlement ou de discrimination tend à s’élargir. Ainsi, faire des remarques déplacées à un  collaborateur sur l’âge, la tenue, le fait de ne pas être à son poste de travail ou en discussion avec des collègues a été jugé comme étant un harcèlement moral (Cass, Soc, 12 juin 2014, n°13-13951 – le salarié a obtenu 13.379 € de dommages intérêts), de même que répéter à un salarié que le travail n’est pas fait comme demandé, faire des reproches avant même la vérification de la réalisation de la tâche, critiquer constamment un salarié… (Cass, Soc, 8 juillet 2009, n°08-41638).   Par conséquent, les salariés désireux de quitter leur poste et d’obtenir des dommages et intérêts conséquents pourraient également être tentés de mettre en place un comportement destiné à provoquer ce type de réaction de leur encadrement.   On imagine sans peine la réaction du patron d’une PME devant l’excès de zèle soudain de l’un de ses collaborateurs qui ne prendrait plus aucune initiative et solliciterait en permanence son avis ou son approbation par exemple…   Enfin, la caractéristique principale des « juges du travail » qu’est le Conseil des Prud’hommes est d’être une juridiction paritaire, c’est-à-dire composée pour moitié de représentants des employeurs, et pour moitié de représentant des salariés… Si les premiers semblent plutôt satisfait de l’instauration des barèmes, il n’en est pas de même pour les seconds… qui pourraient donc bien être tentés d’admettre plus librement les cas de harcèlement et de discrimination.   Car on le sait bien. La seconde caractéristique des Prud’hommes demeure la tentation du jugement « en équité »…