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Barème "Macron" : la Cour de cassation rend son avis demain

Barème
Le 16 juillet 2019
Dès demain, la Cour de cassation va rendre un avis sur ce barème encadrant les indemnités prud'homales pour licenciement abusif. La fin du barème Macron ?

L’avis de la Cour de Cassation du 17 juillet 2019

Demain, le 17 juillet 2019, la juridiction suprême française rendra son avis sur la délicate question du plafonnement des indemnités aux prud’hommes instauré par le barème « Macron » en septembre 2017. En formation plénière, la Cour de cassation se prononcera sur la conventionnalité du barème au regard des textes internationaux.

Cet avis est très attendu, par les justiciables, mais également par les juges des cours d’appel qui seront très prochainement amenés à trancher des litiges où le barème « Macron » est au centre des débats.

Qu’est-ce qu’un avis de la Cour de cassation ?

Au cours d’une procédure judiciaire, il peut arriver que le juge (de 1ère instance, ou de cour d’appel) soit confronté à une question de droit qui pose une difficulté d’interprétation particulière. Avant de rendre sa décision, ce juge peut demander à la Cour de cassation de lui apporter un éclairage. La Cour de cassation rend alors un avis sur la question de droit posée.

Toutefois, l’avis rendu par la Cour de cassation n’emporte pas autorité de la chose jugée. Cela signifie que l’avis ne lie pas les juges, il n’est pas obligatoire. Certains conseillers prud’homaux ont bien compris la portée juridique des arrêts rendus par la Cour, et ont d’ores et déjà indiqué qu’ils ne prendront en compte la position de la Cour de cassation que dans le cadre d’une décision rendue sur une affaire.

Le contexte

Les ordonnances n° 2017-1387 du 22 septembre 2017 relative à la prévisibilité et la sécurisation des relations de travail, surnommées « ordonnances Macron », ont instauré des barèmes encadrant la réparation du licenciement (abusif) sans cause réelle et sérieuse.

Ces plafonds déterminent le montant des indemnités minimales et maximales accordées au salarié licencié abusivement, sur la base de son ancienneté. À titre d’illustration, un salarié avec 5 ans d’ancienneté dans une entreprise de plus de 11 salariés ne pourra prétendre aujourd’hui qu’à une indemnité allant de 3 à 6 mois de salaires bruts.

Auparavant, la fixation de ces indemnités relevait du libre arbitre des conseillers prud’homaux.

La « fronde » des conseillers prud’homaux

Depuis fin 2018, de nombreux conseils de prud’hommes (Troyes, Amiens, Lyon et Grenoble, Agen, Bordeaux…) ont signifié leur opposition à l’instauration de ce barème en passant outre ce dernier, en attribuant des indemnités supérieures au barème à certains salariés licenciés abusivement.

Les juges estiment en effet que le barème « Macron » est contraire aux dispositions des articles 10 de la convention 158 de l'Organisation internationale du travail (OIT) de 1982, et 24 de la Charte sociale européenne du 3 mai 1996.

Que prévoient les textes internationaux ?

L’article 10 de la convention n°158 de l’Organisation Internationale du Travail (OIT).

« Ils [Les juges du conseil de prud’hommes] devront être habilités à ordonner le versement d'une indemnité adéquate ou toute autre forme de réparation considérée comme appropriée ».

L’article 24 de la Charte Sociale Européenne.

« En vue d’assurer l’exercice effectif du droit à la protection en cas de licenciement, les Parties s’engagent à reconnaître : […] le droit des travailleurs licenciés sans motif valable à une indemnité adéquate ou à une autre réparation appropriée. »

Les textes internationaux prévoient donc qu’une juridiction nationale impartiale doit être en capacité d’ordonner le paiement d’une indemnité appropriée et/ou d’une réparation adéquate du préjudice subi par le salarié injustement congédié.

En quoi le barème « Macron » serait-il contraire aux textes internationaux selon les juges ?

Les juges non-professionnels estiment que le barème, en encadrant les indemnités que peut obtenir un salarié face à leur juridiction, contrevient aux textes internationaux car il ne permet pas l’indemnisation de l’ensemble de préjudices subis par le salarié.

Notre avis

Dans le cadre d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, le salarié qui obtient gain de cause face au conseil de prud’hommes peut obtenir plusieurs indemnités, dont des dommages et intérêts (encadrés par le barème) pour licenciement abusif, une indemnité légale/conventionnelle de licenciement, ainsi que d’éventuelles indemnités compensatrices de préavis et de congés payés.

Le barème « Macron » encadre uniquement les indemnités octroyées au salarié pour réparer le préjudice causé par son licenciement abusif. Ainsi, le salarié est en droit de demander au juge la réparation de ses autres préjudices (le plus commun restant le paiement des heures supplémentaires). La réparation octroyée par le juge sur ces autres demandes, elle, n’est pas encadrée dans un barème.

Le juge conserve alors la totalité de sa liberté d’appréciation dans l’évaluation et la réparation du préjudice subi par le salarié.

Dans les affaires les plus graves, le barème « Macron » est exclu et l’indemnité minimale est fixée à 6 mois de salaire, sans plafond. Sont notamment visés les cas de harcèlement (moral et sexuel), de discrimination, de licenciement consécutif à une action en justice en matière d'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes, de licenciement illicite d’un salarié protégé.

Affaire à suivre dès demain avec l’avis de la Cour de cassation

Bastien MARIN

Rédacteur en Droit Social

Droit-Travail-France