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Deuil national : un salarié peut-il ne pas venir travailler ce jour là ?

Deuil national : un salarié peut-il ne pas venir travailler ce jour là ?
Le 26 septembre 2019
Lundi 30 septembre a été décrété jour de deuil national en hommage au décès du Président Jacques CHIRAC. Dans quelles conditions un salarié peut-il s'absenter pour cause de deuil national ? Est-ce seulement possible ?

26 Septembre 2019. La nouvelle est tombée. Jacques CHIRAC, Président de la France de 1995 à 2007 est décédé. Il avait 86 ans. Très vite, Emmanuel MACRON, actuel Président, annonce qu'"afin que les français qui le souhaitent puissent exprimer leurs condoléances" le palais de l'Elysée sera exceptionnellement ouvert ce jeudi soir à partir de 21h et jusqu'à dimanche inclus, qu'un service solennel sera rendu en l'honneur du Président Jacques CHIRAC en l'église de Saint-Sulpice à Paris lundi 30 septembre, et que cette journée sera déclarée deuil national. Mais qu'est-ce que cela signifie pour les salariés ? Et, en particulier, le deuil national autorise-t-il un salarié à ne pas venir travailler ?

Qu'est-ce que le deuil national ?

En France, le deuil national est décrété par le Président de la République. C'est une mesure exceptionnelle qui vise à marquer l'hommage de la Nation, à honorer le deuil et la mémoire d'une ou plusieurs personnes qui, par leurs actions, ont contribué à l'histoire ou l'image de la France.

Le deuil national a été décrété à 9 reprises depuis le début du XXème siècle : après les inondations dans le midi de la France en 1930, les décès des anciens Présidents Charles DE GAULLE, Georges POMPIDOU, François MITTERRAND et maintenant Jacques CHIRAC et après les attentats du 11 septembre aux Etats-Unis, de Charlie Hebdo, du 13 novembre à Paris et du 14 juillet à Nice. 

Il n'existe pas de codification officielle des actions à mener, en général un deuil national s'exprime avec la mise en berne des drapeaux sur les édifices publics et l'instauration de minutes de silence. Ainsi, aucune fermeture et aucune annulation n'ont accompagné les deuils de 2015 et 2016... 

Le deuil national est-il une raison suffisante pour ne pas venir travailler ?

Tout dépend. Du Premier Ministre, d'une part, de l'employeur, d'autre part.

A la suite des attentats de Nice du 14 juillet 2016, Maître Eric ROCHEBLAVE, avocat au Barreau de Montpellier, s'était particulièrement ému de la situation, indiquant notamment qu'il était "fâcheux que (...) les Circulaires du Premier Ministre ne prévoient pas que l'ensemble de nos concitoyens puisse se joindre à cet hommage, notamment en n'invitant pas les employeurs à permettre à leurs salariés d'y participer, alors que c'était le cas pour le deuil national en homage aux vicitmes des attentats commis à Paris le 13 novembre 2015".

Une journée de deuil national n'est en général pas une journée chômée.

La Circulaire du Premier Ministre à paraître pourrait en effet inviter les employeurs à mettre en place toutes mesures nécessaires afin de permettre à leurs salariés de participer aux cérémonies de ce deuil national. Sur le principe, le Premier Ministre Édouard Philippe pourrait aller jusqu'à imposer une journée chômée.

Toutefois, si depuis le début du XXème siècle on a pu constater que la durée du deuil national avait tendance à s'allonger, notamment sous la présidence de François HOLLANDE, force est de constater qu'en revanche les activités quotidiennes qui l'accompagnent tendent à s'amenuiser. L'effet probable de l'augmentation du rythme des journées de deuil national pourraient regretter certains, la marche de l'économie pourraient opposer les autres... 

Quelles que soient les raisons, il est cependant peu probable que la Circulaire déclarant le 30 septembre jour de deuil national en la mémoire du Président Jacques CHIRAC obligent les employeurs à fermer boutique.

Peut-on être sanctionné pour absence injustifiée en cas d'absence un jour de deuil national ?

En général donc, le deuil national est davantage une invitation lancée aux citoyens, aux entreprises et aux salariés qui le souhaitent, de participer à un l'hommage commun rendu à la ou les personnes dont les actions ont durablement marqué la France. Il n'y a donc aucune contrainte ni aucune obligation juridique.

"Si un salarié souhaite saluer la mémoire des disparus en effectuant du bénévolat par exemple, il sera soumis au contrôle d'un juge, qui se chargera de vérifier que ce dernier ne part pas en vacances", expliquait en 2016 Maître ROCHEBLAVE suite aux attentats de Nice.

De la même manière, si un salarié souhaite participer aux hommages nationaux qui seront rendu au Président Jacques CHIRAC, par exemple en se rendant au Palais de l'Elysée ou au service solennel qui lui sera rendu en l'Eglise de Saint-Sulpice, son éventuelle sanction sera soumise au contrôle d'un juge qui vérifiera notamment sa présence lors de ces commémorations. 

Privilégiez le dialogue avec l'employeur.

Il serait tentant d'user de son droit de retrait également. Cependant, le droit de retrait tel que défini par l'article L.4131 du Code du Travail permet seulement au salarié ayant "un motif raisonnable" de penser qu'une situation "présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé" de "se retirer d'une telle situation" sans qu'une sanction ne puisse lui être imposée.

Or, en dépit de la grande tristesse que certains peuvent en éprouver, en France et dans le monde, le décès du Président Jacques CHIRAC n'est certainement pas un "danger grave et imminent" permettant de justifier la mise en application de son droit de retrait pas un salarié quelconque.

C'est pourquoi, si vous souhaitez participer aux commémorations organisées un jour de deuil national, nous vous engageons fortement à en échanger avec votre employeur afin de mettre en place, avec lui, les mesures appropriées et qui respecterons les intérêts de chacun. 

Il a fort à parier, en outre, que ce dialogue serait le plus bel hommage à rendre à celui qui a rappelé au monde de "laisser les enfants venir", sinon "il repartait dans son avion".

                                                                                                                                                                   Ingrid Tronet

                                                                                                                                                                  Tronet Conseils