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Le congé paternité : une source d’inégalité entre les hommes et les femmes ?

Le congé paternité : une source d’inégalité entre les hommes et les femmes ?
Le 14 août 2018
Trop court, mal rémunéré… Le congé paternité est remis en question dans une logique d’égalité entre les femmes et les hommes. Il reste aujourd'hui une source d’inégalité entre les hommes et les femmes. Explications.

En janvier 2018, Marlène Schiappa, secrétaire d’État chargée de l’égalité entre les hommes et les femmes, plaidait pour un allongement du congé paternité mais aussi une meilleure indemnisation. Qu’en est-il aujourd’hui ?

Le congé paternité : quelles modalités pour y recourir ?

Depuis 2003, les pères peuvent bénéficier du congé paternité sous conditions d’ouverture de droit. Le congé paternité est un congé de 11 jours qui s’ajoute aux 3 jours prévus par le Code du travail.

Le salarié qui souhaite bénéficier du congé de paternité avertit son employeur au moins un mois avant la date à laquelle il envisage de le prendre, en précisant la date à laquelle il entend y prendre fin. Ce congé doit être pris dans un délai de 4 mois suivant la naissance de l’enfant. Cependant, le congé paternité peut être reporté au-delà des 4 mois en cas d’hospitalisation de l’enfant ou décès de la mère.

Comment est rémunéré ce congé ?

Le congé paternité est indemnisé par les indemnités journalières versées par la CPAM. Pour toucher les indemnités, la demande devra être faite dans les 4 mois qui suivent la naissance. L’assuré devra avoir travaillé au moins 150 heures au cours des 3 mois ou, à défaut, avoir cotisé sur un salaire au moins équivalent à 1015 fois le SMIC horaire, soit 10 028,20€ en 2018.

Le montant de l’indemnité journalière est égal au minimum au salaire journalier de base de l’assuré. Ce salaire journalier est calculé en prenant en compte les trois derniers bulletins de salaire avant la date du début du congé paternité (12 derniers bulletins de salaire pour les travailleurs saisonniers), dans la limite du plafond mensuel de la Sécurité sociale de l'année en cours (soit 3 311 € en 2018). On retire ensuite à ce salaire de base un taux forfaitaire de 21%, correspondant aux cotisations et contributions salariales (CSG, CRDS, etc.). Le montant minimum de l’indemnité journalière versée dans le cadre d’un congé paternité est de 9,29 € pour 2018. Quant au montant maximum, il s’élève à 86 € pour 2018.

Le congé paternité : durée trop courte et mal rémunéré…

Passer plus de temps avec leur nouveau-né, les pères bricolent entre cumul de congés payés, congé parental ou les jours offerts par les entreprises.

Aujourd’hui, la plupart des pères prennent leur congé paternité. On dénombre à peu près 7 pères sur 10.

L’allongement du congé paternité est une avancée que bon nombre de pères réclament. D’autant plus, que ce congé n’est pas 100 % indemnisé, sauf si l’entreprise prend le reste en charge. En effet, 11 jours est une durée trop courte pour construire un lien avec l’enfant. Marlène Schiappa s’est dite "à titre personnel (…) pas favorable à ce que le congé paternité ait la même durée que le congé maternité". La raison est simple, il est beaucoup plus long pour les raisons biologiques de la grossesse et de l’accouchement. D’autant plus, que cela engendrerait un coût important.

L’augmentation du congé paternité de quelques jours serait tout même bénéfique. En effet, pour la secrétaire d’État chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes, l’idée est d’avoir un meilleur partage des tâches entre les parents. Si les femmes passent moins de temps aux tâches domestiques, elles auront la possibilité de passer plus de temps à développer leur carrière. Le coût de cette mesure devrait être évalué par l’IGAS.

Congé paternité : quand copiera-t-on nos voisins européens ?

Certaines entreprises ont bien compris la problématique. En plus des 11 jours prévus légalement, le groupe suédois Ikea a annoncé, le 10 janvier 2018, l’ajout de 14 jours supplémentaires payés intégralement. L’entreprise souhaite permettre à ses salariés d’allonger le congé paternité à 5 semaines. Ce congé sera totalement rémunéré et pourra être pris en une ou plusieurs fois jusqu’aux 2 ans de l’enfant. Dans cette optique, la culture d’entreprise suédoise reconnaît aussi bien la place de la mère que du père dans l’accueil et l’éducation des enfants s’inscrivant dans une avancée majeure dans l’égalité entre les femmes et les hommes.

Ainsi, si un pays vise l’égalité entre les hommes et les femmes, une mesure simple est d’accorder l’égalité des congés accordés aux pères et aux mères après une naissance. Le 26 juin 2018, l’Espagne est devenue l’un des rares pays européens à s’engager vers une telle mesure. En effet, elle a coté l’égalité entre congé maternité et congé paternité. Les pères et mères espagnols auront bientôt droit à la même quantité de congés : 112 jours indemnisés à 100 % à partir de la naissance ou l’adoption d’un enfant.

En juin 2018, le président Emmanuel Macron a rejeté la mesure égalitaire proposée par la directive européenne sur l’équilibre vie privée et vie professionnelle qui avait pour finalité de tirer tous les pays de l’Union vers l’égalité entre les hommes et les hommes, en rendant obligatoire un congé paternité de 10 jours et en rémunérant dignement un congé parental de 4 mois pour la mère autant que pour le père. Le congé paternité ne sera donc pas rendu obligatoire. Quant au congé parental, le voilà réduit à un mois et demi par parent et plus aucun niveau de rémunération n’est fixé.

Interrogé le 17 avril 2018 devant le Parlement européen sur cette directive, le président déclarait : «J’en approuve totalement le principe, mais les congés parentaux payés au niveau de l’indemnité maladie journalière, c’est une belle idée qui peut coûter très cher et finir par être insoutenable ».

Le congé paternité reste source d’inégalité entre les hommes et les femmes, alors qu’il s’agissait une « grande cause » du quinquennat d’Emmanuel Macron…

L’équipe juridique Droit-travail-France.fr