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Réforme du Code du Travail : les droits des femmes à la trappe ?

Réforme du Code du Travail : les droits des femmes à la trappe ?
Le 19 septembre 2017
Les ordonnances vont-elles accroître les inégalités et peser particulièrement sur les femmes, comme le dénonce une récente tribune féministe sur Médiapart ?
De nouvelles voix s’ajoutent à la contestation des ordonnances portant réforme du Code du Travail. Après l’opposition des syndicats, des transporteurs, ce sont soixante personnalités et organisations qui dénoncent, tous bords confondus, des mesures qui « vont donc peser particulièrement sur les femmes et accroître les inégalités professionnelles ».

 Des femmes plus touchées car en situation plus précaires.

« Lorsque vous proposez une réforme dans un pays comme la France, où les inégalités professionnelles sont fortes (26% d’écart de salaire), la réforme est rarement neutre ou sans effet. Soit elle aggrave la situation et augmente les inégalités, soit elle s’attaque aux inégalités et les fait reculer. Les ordonnances rentrent dans la première catégorie. Les salarié.e.s les plus touché.e.s par la réforme sont ceux en CDD ou travaillant dans des petites entreprises. Deux catégories où les femmes sont surreprésentées. Plusieurs mesures vont donc peser particulièrement sur les femmes et accroître les inégalités professionnelles. »

Les signataires dénoncent tout à trac la philosophie générale de la réforme du Code du Travail : donner plus de flexibilité aux entreprises pour aller vers une « cogestion à l’allemande ».
 
En ligne de mire, les accords de mobilité ou les accords de compétitivité, autorisés dès lors que le fonctionnement de l’entreprise le nécessite, et que les salarié.e.s seront obligés d’accepter sous peine de licenciement ou les nouvelles prérogatives des  branches relatives aux Contrats à Durée Déterminées puisque ce sont elles qui désormais fixeront les modalités de renouvellement des CDD, leur durée globale ou les délais de carence.
 
Or, selon l’INSEE, trois CDD sur cinq sont signés par des femmes et, selon les signataires « les femmes (qui sont) plus souvent à temps partiels, plus souvent précaires, à la tête de familles monoparentales et prenant en charge une immense partie des tâches parentales seront particulièrement pénalisées par ces mesures ».
 
Les « droits familiaux » moins bien protégés…
 
Marlène Schiappa, Secrétaire d’Etat à l’égalité hommes-femmes avait tenu à rassurer, suite aux indiscrétions de la CGT et de la CFDT qui avaient laissé entendre, vers la fin des concertations avec le gouvernement, que celui-ci envisageait de ne plus faire du congé maternité un congé « intouchable ». Selon elle, rien, dans la réforme annoncée, ne devait venir mettre en péril ce « droit acquis ». Et pourtant !
 
Si la durée minimale du congé maternité n’est pas remise en cause (ndlr six semaines avant la date présumée de l’accouchement et dix semaines après la date de celui-ci) et demeure du ressort de la Loi, en revanche un accord d’entreprise pourra réduire ou supprimer les jours de congé éventuellement prévus par la convention collective. Idem avec le principe de rémunération intégrale pendant le congé maternité, la réduction d’horaire pendant la grossesse ou le nombre de jours de congés « enfant malade ». Les signataires rappellent également que ce sera également le cas pour les primes d’ancienneté, de départ en retraite ou de licenciement…
 
Or, précise la tribune, « le premier argument invoqué par les femmes qui se retirent du marché du travail est l’impossibilité de remplir leurs responsabilités familiales du fait des horaires atypiques qui leur sont imposées. Les ordonnances ne risquent pas de les aider ».
 
Les inégalités moins bien surveillées. 
 
Alors que Marlène Schiappa organisait une action de sensibilisation à la mixité pour dix entreprises particulièrement mauvaises en la matière, les signataires de la tribune s’inquiètent de la disparition du CHST (Comité d’Hygiène, de sécurité et des conditions de travail), « instance dédiée à la santé et à la sécurité au travail », qui aura forcément un « impact sur la prévention des violences sexuelles au travail » alors que « 20% des femmes déclarent avoir déjà subi du harcèlement sexuel sur leur lieu de travail ».
 
Les signataires accusent également le gouvernement « d’affaiblir les outils de l’égalité professionnelle en entreprise » en précisant que le droit d’expertise dédié à l’égalité femmes-hommes permettant notamment d’identifier et comprendre les sources des inégalités, et qui jusqu’à présent était financé entièrement par l’entreprise, devra désormais être cofinancé par le Comité d’Entreprise (CE). Or, « du fait de son budget limité, celui-ci devra faire des choix. Et souvent, dans ce cas, l’égalité passe au second plan ».

Enfin, dans la mesure où 60% des 50 plus grosses branches n’ont pas d’accord valide sur le thème de l’égalité homme/femme, la négociation sur le sujet revient aux entreprises. Or, les ordonnances permettent à l’entreprise, par accord, de négocier sur l’égalité une fois tous les 4 ans seulement, et pas nécessairement tous les ans. Pire, elle pourra regrouper toutes les négociations obligatoires (NAO), et les détracteurs craignent qu’une entreprise ne cherche à noyer l’égalité professionnelle dans la GPEC (Gestion Prévisionnelle des Emplois et des Compétences) par exemple.