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Le licenciement pour inaptitude

Définition du licenciement pour inaptitude

Le licenciement pour inaptitude est un mode spécial de licenciement intervenant après un avis médical de la médecine du travail jugeant le salarié inapte à poursuivre son activité professionnelle. Cet avis peut être rendu après une maladie professionnelle, un accident du travail, ou à la suite de tout état physique ou mental, partiel ou total, rendant impossible la poursuite du contrat de travail par le salarié.

En d’autres termes, cette rupture du contrat de travail intervient pour les salariés ne pouvant plus mener leurs missions à bien et dont le reclassement est impossible au sein de l’entreprise. Ce mode de licenciement ne résultant d’aucune faute du salarié, il ouvre le droit à une indemnité spéciale de licenciement.

Procédure du licenciement pour inaptitude

Le constat de l’inaptitude par la médecine du travail

Avant de pouvoir engager une procédure de licenciement pour inaptitude, il faut que l’inaptitude ait été constatée par la médecine du travail, seule juge de la santé du salarié ( article L4624-4 du Code du travail). Le médecin du travail doit respecter une procédure stricte avant de procéder à la déclaration d’inaptitude d’un salarié.

Cette procédure peut être déclenchée à la suite de toute visite médicale (examen médical d’aptitude à l’embauche, examen médical faisant suite à la visite d’information et de prévention, visite de reprise après un arrêt de travail, visite à la demande de l’employeur/du salarié… ).

Examens médicaux

Avant de déclarer un salarié inapte, le médecin du travail doit avoir procédé à un examen médical. Dans un délai de 15 jours, le médecin peut procéder à un deuxième examen pour rassembler les éléments permettant de motiver sa décision.

Etude du poste et des conditions de travail du salarié

En application de l’article R.4624-42 du Code du travail, le médecin du travail doit procéder à une étude du poste du salarié ainsi qu’à une étude des conditions de travail dans son établissement.

Echange entre le médecin du travail, l’employeur et le salarié

La constatation de l’inaptitude par le médecin du travail suppose un échange entre toutes les parties en présence. Ainsi, au cours des examens médicaux, le médecin du travail échangera avec le salarié concerné sur :

  • Les mesures d'aménagement, d'adaptation ou de mutation de poste,
  • La nécessité de changer de poste.

Par la suite, le médecin du travail reçoit le salarié afin d'échanger sur l'avis et les indications ou les propositions qu'il pourrait adresser à l'employeur.

Le médecin et l’employeur échangeront quant à eux sur l’issue de la procédure. L’employeur pourra faire valoir ses observations sur l’avis et les propositions formulées par le médecin du travail. Cet échange peut être accompli par tous moyens (téléphone, entretien, mail, courrier).

C’est uniquement à l’issue de cette procédure, et seulement après que le médecin du travail a constaté qu’aucune mesure d’aménagement, d’adaptation ou de transformation du poste de travail occupé n’est possible, que le salarié pourra être déclaré inapte à son poste de travail.

Cette déclaration résulte d’un avis d’inaptitude rédigé par le médecin du travail. Il est accompagné de ses conclusions écrites et de ses indications quant au reclassement du salarié. L’avis du médecin du travail peut être motivé soit par une inaptitude physique, soit par une inaptitude mentale du salarié. Toutefois ces motivations ne seront pas transmises à l’employeur : ce dernier saura seulement si le salarié est apte ou non à reprendre le travail, et quels sont les postes qu’il pourrait éventuellement occuper.

Depuis la loi Travail de 2017, le médecin du travail peut immédiatement exclure le reclassement du salarié, après analyse des conditions de travail. Les motifs devront être : « tout maintien du salarié dans l’entreprise serait gravement préjudiciable à sa santé » ou « l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans l’emploi ».

Attention : Le médecin du travail peut aussi rendre une décision d’inaptitude partielle. Dès lors, il est envisageable qu’un employeur décide de proposer à un salarié un mi-temps thérapeutique.

Consultation des instances représentatives du personnel / Comité Social et Économique

Après avoir reçu l’avis d’inaptitude du médecin du travail, l’employeur est tenu de consulter les représentants du personnel ou du CSE avant toute tentative de reclassement ou de licenciement.

Cette consultation est rendue obligatoire par la Loi Travail et doit impérativement être formalisée. Ceci permettra à l’employeur de prouver que la procédure de licenciement a été menée régulièrement et d’écarter toute sanction prud’homale pour défaut de procédure.

L’avis du CSE ou des RP n’oblige en rien l’employeur quand bien même leur consultation est obligatoire. Cependant, dans un but de dialogue social pacifique, on ne peut que recommander de prendre en compte l’avis des IRP avant toute procédure de licenciement.

Ne pas consulter le CSE ou les délégués du personnel constituerait un délit d’entrave et exposerait l’employeur à des sanctions pénales.

Le reclassement du salarié suite à l’avis du médecin du travail

Suite à l’avis du médecin du travail, l’employeur sera tenu de chercher une possibilité de reclassement du salarié au niveau de l’entreprise. Celui-ci devra impérativement suivre les recommandations, aménagements ou mesures décidées par la médecine du travail pour être valide.

L’obligation de reclassement de l’employeur est, contrairement à ce que l’on pourrait croire, une obligation de moyen renforcé et non une obligation de résultat. Dès lors, il est concevable que l’employeur ne puisse tout simplement pas reclasser le salarié. Il devra cependant s’assurer de montrer que sa démarche a été sérieuse et de bonne foi.

L’employeur a à sa disposition plusieurs techniques pour reclasser son salarié : il peut le muter, adapter son poste, changer totalement son poste, essayer de le reclasser dans une autre branche de son entreprise, etc.

L’employeur ne peut cependant pas proposer un poste allant à l’encontre des recommandations préconisées par le médecin du travail.

Ainsi, si aucun poste n’est compatible avec la situation du salarié, l’employeur ne peut que le licencier ou faire appel de la décision du médecin du travail et obtenir une nouvelle consultation.

Si l’employeur propose un reclassement à son salarié, encore faut-il que ce dernier ne le refuse pas. Bien évidemment, comme l’emploi doit être proche de l’emploi initial du salarié, celui-ci ne devrait normalement pas s’y opposer. Cependant, la jurisprudence d’avant 2017 admettait que le salarié puisse refuser le poste proposé s’il justifie son désaccord. Cependant, un nombre de refus abusif du salarié le privera des indemnités spéciales de licenciement.

Plus grave encore, le comportement fautif du salarié vis à vis de cette procédure de reclassement pourrait le conduire à un licenciement pour faute grave le privant de toute indemnité. Dorénavant, par effet de la loi Travail, un seul refus peut justifier le licenciement pour inaptitude.

Le licenciement du salarié pour inaptitude

Si aucun reclassement n’est possible pour le salarié, l’employeur devra se résoudre à le licencier. Ce licenciement suit les règles d’un licenciement “classique” pour motif personnel, mais il faut faire attention à ne pas commettre certaines erreurs qui pourraient conduire l’employeur devant le conseil de prud’hommes.

Le licenciement du salarié suite à l’échec du reclassement

Pour licencier le salarié, il faut tout d’abord convoquer ce dernier à un entretien préalable.  Au cours de celui-ci, l’employeur devra présenter au salarié les études de reclassement qu’il aura mené et les raisons qui le conduisent à le licencier. A cette occasion, il est très important que l’employeur soit didactique quant à l’impossibilité de reclassement et qu’il laisse la porte ouverte à des solutions, si tant est qu’elles existent.

L’employeur, suite à l’entretien, ne pourra rendre une décision que deux jours après la date de l’entretien préalable. La notification du licenciement se fera via une lettre de licenciement et entraînera un licenciement sans préavis étant donné qu’il sera motivé par une urgence.

Si l’employeur met plus d’un mois à notifier le licenciement du salarié, il sera contraint de lui payer un mois de salaire, quand bien même il ne serait pas revenu travailler.

Comme tout licenciement, l’envoi de la lettre de licenciement se fera par lettre recommandée avec accusé de réception et reprendra en détail les arguments invoqués au cours de l’entretien préalable.  Il convient cependant de faire très attention au motif du licenciement. Ce dernier ne devra jamais être un licenciement pour raison de santé ou pour handicap, ces derniers étant discriminatoires.

Le licenciement pour inaptitude du salarié protégé

Dans le cas du licenciement pour inaptitude d’un salarié protégé, une seconde procédure s’ajoute à la procédure existante. Il faudra consulter le CSE directement après l’entretien préalable de licenciement avant de demander l’autorisation de licencier à l’inspection du travail.

Cet entretien avec le CSE est obligatoire mais, encore une fois, ne lie pas l’employeur.

Au cours de cet entretien, il faudra aborder les mandats du salarié protégé concerné, la situation du salarié au sein de l’entreprise, la déclaration d’inaptitude par le médecin du travail, les éléments montrant l’impossibilité de son reclassement ainsi que le déroulement de l’entretien préalable.

Après cet entretien, l’inspection du travail devra être consultée afin d’obtenir l’autorisation de licencier le salarié protégé. Cette autorisation est obligatoire et tout licenciement pris en son absence sera nul et constituera un délit d’entrave.

Les conséquences d’un licenciement pour inaptitude

Licencier un salarié pour inaptitude n’est pas sans conséquence pour l’employeur.

En effet, les indemnités dues sont supérieures aux indemnités basiques de licenciement.

L’employeur ne devra pas verser à son salarié une indemnité compensatrice de préavis, ce préavis n’existant pas, mais devra cependant prendre en compte le préavis “normal” dans l’ancienneté du salarié pour le calcul des indemnités spéciales de licenciement.

L’employeur devra verser une “indemnité spéciale de licenciement” au salarié. Cette indemnité correspond au double de l’indemnité normale de licenciement.

Si jamais l’indemnité de licenciement non doublée prévue par la convention collective est plus élevée que l’indemnité spéciale de licenciement, on versera au salarié l’indemnité prévue par la convention collective. On versera aussi au salarié une indemnité compensatrice de congé payé. Les droits au chômage seront ouverts suite au licenciement.

N’hésitez pas à prendre contact avec l’un de nos avocats en droit du travail pour toute question complémentaire sur le sujet.

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